Séminaire en ligne : "Les statistiques coloniales et post-coloniales (19-21e siècle)"

Le séminaire proposé vise à discuter des enjeux, des usages et des effets des statistiques ‘officielles’ produites par les autorités politiques des territoires, qu’il s’agisse des autorités coloniales ou traditionnelles ou de celles des Etats devenus indépendants. Il s'agit de s’intéresser aux intentions des commanditaires de statistiques, à la signification de leur commande et à ses effets. Le séminaire sera aussi l’occasion  de présenter un programme de recherches financé par l’ANR ("Compter en situation coloniale" ANR-21-CE41-0012) concernant les statistiques des territoires d'Afrique de l'Ouest, puis devenus indépendants. Il s’agit à la fois de préciser comment ces statistiques sont produites, de savoir par qui et pourquoi, d’évaluer leur coût/bénéfices, et d'analyser l’impact des classifications et des hiérarchies qu’elles introduisent sur les relations économiques, sociales et politiques. 

L’interprétation de la continuité ou de la discontinuité des systèmes statistiques entre la période précoloniale et coloniale puis au moment des indépendances sera également interrogée pour éclairer les héritages et les mécanismes de transmission sociale et politique à l’oeuvre dans ces changements. Seront aussi interrogés : le lien entre ces conventions et le pouvoir ou la domination politique ou économique (référence aux classements de la Banque mondiale, par exemple); les lacunes des statistiques, ce qu’elles ne ‘disent’ pas, volontairement (traitement statistique du travail des femmes - ‘invisibilisation', par exemple) ou involontairement, ce qu’elles ne voient pas parce que cela ne sert pas les intérêts du Prince (la production domestique ou artisanale, par exemple), mais aussi ce qu’elles déforment pour des raisons politiques ou du fait de la concurrence entre services…Il s’agira de montrer ce que ces statistiques nous apprennent des rapports de force internes aux administration, aux circonscriptions régionales, aux ethnies ...

Bien au delà de l’ANR, l’idée de cette recherche est d’inciter à multiplier les études en croisant les échelles d’analyse (échelle impériale, nationale, fédérale, territoriale, locale, individuelle et des groupes d’intérêt). A tous ces niveaux il s’agit de préciser ce que nous apprennent les statistiques coloniales et post-coloniales sur les sociétés qu’elles sont censées refléter.